Témoignages et photos

L’association récolte et publie depuis 2007 de nombreux témoignages relatifs à l’Arthrogrypose, principalement sur l’espace membre, réservé aux adhérents. Cependant, des témoignages et photos illustrent les différents articles de ce site public.

Quelques photos extraites de notre film !

Cliquer pour faire défiler les photos en grand

Documentaire : Vivre avec l’arthrogrypose (2015)

Retrouvez certains témoins dans notre documentaire : vivre avec l’arthrogrypose (accès public)

Notre documentaire Vivre Avec

Témoignages filmés lors de nos week-end rencontres

Dans la vidéothèque de l’espace membre ⓜ, vous pouvez retrouver des séquences filmées lors de nos week-ends : conférences scientifiques, psychologiques ou témoignages de participants.

Témoignages depuis 2010

Avec la création de l’association Alliance Arthrogrypose en 2005, et l’élaboration d’une gazette à partir de 2010,
les témoignages écrits sont regroupés à partir de cette date dans des « gazettes » semestrielles.
Retrouvez plus de 20 gazettes dans l’espace réservé aux adhérents de l’association dans l’espace membre ⓜ

Les articles de la gazette sont également accessibles dans la médiathèque de l’espace membre, avec filtrages par mots clés :

Témoignages de 2002 à 2008

Retrouvez les témoignages (2002-2008) de l’ancien site personnel d’Adeline Loguiot-Bozie arthrogrypose.com d’avant l’association, sauvegardé dans notre espace réservé aux membres : https://www.arthrogrypose.fr/a/com/

Page Temoignages-
Arthrogrypose.com par Adeline

Oui, c’est possible !

A la naissance d’un enfant arthrogrypose, les parents essaient de se projeter dans l’avenir et pensent à tout ce que leur enfant ne pourra pas faire. Cependant, les personnes arthrogrypose sont souvent très volontaristes, et finalement, font parfois des choses qui paraissaient impossibles…Ils publient parfois dans nos gazettes des récits de leurs « exploits ». Nous en avons choisis 7, et en publions ci-dessous un différent chaque jour.

Vous trouverez dans notre vidéo « Vivre Avec » de multiples témoignages et, mieux que des mots, des images de ce l’on peut faire en étant atteint d’arthrogrypose. Oui, c’est possible !

N’hésitez pas à adhérer et soutenir l’association pour accéder à tous les témoignages (vidéo et écrits) dans notre espace membre !

Lundi : Dix étapes pour le permis de conduire adapté

récit extrait de notre gazette gazette n°4 de 2011

Comme pour nos autres enfants, nous avons souhaité que Juliette passe son permis de conduire en conduite accompagnée. Pour l’obtention de son permis, plusieurs étapes ont été franchies. Pour information, toutes ces étapes sont propres au parcours de Juliette : selon le degré d’autonomie, la procédure peut être différente. Et selon votre département, les démarches de la MDPH ( Maison Départementale des ¨Personnes Handicapées ) peuvent être différentes…
Accrochez votre ceinture et c’est parti :

1ère étape : l’auto-école

Il faut d’abord trouver une auto-école agréée pour personne en situation de handicap ; nous avons eu la chance d’en avoir une sur… notre quartier !!!

2ème étape : la convocation

Après ouverture du dossier, Juliette a été très vite convoquée à une visite médicale à la préfecture afin d’établir les aménagements dont elle a besoin. C’est l’auto-école qui en fait la demande.
Nous n’avons pas très bien vécu ce moment… Car d’une part, la visite s’est passée uniquement avec Juliette, en présence de deux médecins qui, bien sûr ,ne connaissent pas l’arthrogrypose (ils m’ont invitée à rester en salle d’attente !!! dur dur pour une mère infirmière) et, d’autre part, elle est sortie avec une liste de codes d’aménagements du véhicule, persuadée qu’elle ne pourrait jamais atteindre les pédales… (Juliette mesure seulement 1m42 !!).

3ème étape : l’équipement

Au retour, à la lecture de cette liste, l’auto-école nous a orientées vers une personne responsable des aménagements. Rencontre avec cette personne, essais sur voiture et élaboration d’un devis…
En gros, pour Juliette il fallait : boîte automatique, boule sur volant, rehausse pédale ou accélérateur au volant.

4ème étape : la course aux devis

Nous avons souhaité rencontrer d’autres installateurs et nous avons trouvé des adresses via le salon du handicap à Lyon.
Nouveaux essais + devis. Pour information, il est vivement conseillé de faire plusieurs devis : pour nous, la différence de prix et de matériels étaient surtout pour l’installation de la grue pour son fauteuil électrique. Pour le reste : boule volant, boite automatique… Les tarifs étaient homogènes.

5ème étape : le dossier

Choix de l’installateur et montage du dossier MDPH avec demande de PCH ( Prestation de Compensation du Handicap ) pour l’achat et l’aménagement du véhicule. Il faut attendre la réponse de la MDPH avant de se lancer dans les achats et travaux.

6ème étape : le véhicule

Achat du véhicule et installation des aménagements. Nous avons acheté un CADDY Volkswagen, avec un coffre suffisamment grand pour y loger son fauteuil électrique !!

(Durant tout ce temps, Juliette a suivi les cours de code, elle a obtenu le code du premier coup et a commencé à conduire avec la voiture adaptée de l’auto-école mais les adaptations n’étaient pas tout à fait correctes pour elle : l’accélérateur au volant de la voiture ne lui convenait pas. Alors elle a essayé de conduire avec les pédales et petit à petit , elle a réussi. Elle a fini par ne conduire qu’avec les pédales et a eu besoin de seulement 21 h de pratique avant de pouvoir conduire avec nous en conduite accompagnée).

7ème étape : la conduite

Elle conduit avec nous avec la voiture aménagée adaptée pour les 3 000 km de conduite accompagnée.
Ses aménagements sont : boîte auto, boule au volant. Notre voiture est équipée auto-école (pédales passager + rehausse rétro), car elle passera son permis sur son véhicule ( ce n’est pas général dans tous les cas, cela dépend de la compatibilité du véhicule de l’auto-école au handicap de la personne). Cet aménagement sera retiré lorsqu’elle aura son permis.
Sur la voiture, il y a également un accélérateur à la main, qu’elle a très peu utilisé car elle arrive très bien à conduire aux pieds. Nous avons fait aménager le coffre pour son fauteuil électrique (grue).

8ème étape : le contrôle

Les aménagements de la voiture ont été validés par un inspecteur spécialisé auto-école avant l’épreuve du permis.

9ème étape : le permis

L’épreuve pratique du permis… à la fin du mois de janvier pour Juliette !!! Réussite du premier coup !!

10ème étape : ultime visite avant Champagne !

Après l’obtention du permis, une nouvelle visite médicale a été nécessaire pour définir la durée de validité. Pour Juliette, le médecin a décidé une validité de 5 ans, mais nous espérons qu’en 2016, elle se transforme en une validité permanente.
(Cette ultime visite médicale s’est imposée car il s’était écoulé près de trois ans depuis la visite initiale à la commission médicale.)

En attendant, BONJOUR LA LIBERTE ! L’autonomie peut s’écrire avec un grand A !!!!
Que du BONHEUR.

Marie-Claude

Mardi : Arthrogrypose en rallye


Je m’appelle Marion N. Je suis atteinte d’une Arthrogrypose qui touche essentiellement mon genou gauche et mes hanches… J’ai intégré en première année le programme post-bac de l’École Supérieure de Commerce de Troyes. Dans le cadre de mes études, j’ai dû monter un projet associatif, je me suis donc dirigée vers l’humanitaire en m’inscrivant au 4L Trophy avec ma coéquipière Claire P. Le principe est simple : des étudiants de la France entière partent en Renault 4L par équipages de 2 personnes et dans leur coffre, environ 60kg de fournitures scolaires ou d’équipements sportifs. Le départ du rallye, situé à Paris, amène les étudiants en manque d’aventure à traverser la France et l’Espagne pour se retrouver dans le désert marocain pour 2 jours de course d’orientation intensive. Les plus courageux, qui arrivent à la fin des 2 jours de bivouac en plein désert, prennent la direction Marrakech où, après de longues heures de voyage, les étudiants partagent enfin un moment unique en offrant les fournitures aux enfants marocains, le but étant de leur faciliter l’accès à l’éducation.

Cependant le rallye reste la dernière étape de notre aventure. Le but de la première étape est de boucler un budget prévisionnel d’environ 7000 euros. Nous avons donc commencé à démarcher juste après notre inscription. La recherche de sponsors est une étape très importante au bon fonctionnement de ce projet, d’autant plus que nous étions limitées dans le temps : nous devions avoir réuni 3100euros, et avoir une 4L avant le 15 décembre, pour valider notre inscription définitive au 4L -Trophy.

Nous avons donc tout de suite commencé en démarchant les commerces de Troyes et passé notre jeudi après-midi à visiter les zones de commerce, les zones industrielles, à passer des coups de fil à environ 250 entreprises… Je dois dire que ce fut une étape assez éprouvante, quand nous partions pour 3 à 4h de démarchage et que nous ne revenions qu’avec des « non » c’était assez déprimant.

Néanmoins à l’heure d’aujourd’hui, de petites et moyennes entreprises comme l’hôtel Mercure, l’auto-école, un magasin de logiciel de Troyes Thallium Technology, Studio K ainsi que maintenant votre association, nous ont permis de récolter suffisamment de fonds pour être sûres de partir… Il nous manque encore un tout petit peu pour se dire en « sécurité ».

Si j’ai choisi de participer à ce projet, c’est que, tout d’abord, je suis attirée par l’humanitaire. Ensuite, j’ai trouvé une coéquipière parfaite : organisée, débrouillarde, et surtout extrêmement motivée. Enfin ce projet mêle entraide, esprit d’équipe et de partage, aventure, difficulté, expérience unique… En participant à ce rallye je compte bien prouver que malgré les difficultés de chacun, rien n’est impossible. Nous sommes un équipage de deux filles qui n’ont pas froid aux yeux et qui ont en commun un brin de folie…

Faute de place ici, vous voudrez bien vous reporter aux gazettes nos 1, 2 et 3 pour connaître le début des aventures du départ de Paris, le 18 février jusqu’à ce 25 février, au Maroc…

25 et 26 Février: Étape Marathon

L’étape Marathon est un parcours de deux jours dans le désert en complète autonomie.
Nous avions 500km à parcourir dans le désert, nous devions traverser des petits villages, des carrières, des plaines, des montagnes, longer la frontière de l’Algérie…

Cependant, pour participer à cette étape, il fallait que notre voiture soit apte, car les conditions dans lesquelles nous allions conduire été pires que toutes les précédentes. Les pistes de cailloux que nous avions rencontrées précédemment n’étaient rien comparées à ce qui nous attendait.

C’est pourquoi, nous nous sommes tous organisés pour rouler en groupe d’au moins 4 ou 5 voitures, et se retrouver en un même point le soir autour d’un grand feu de camp. C’est ainsi nous pouvions trouver dans le désert des campements de 15 à 20 équipages ; bien que l’on ne se connaisse pas, l’ambiance était au rendez-vous !

Le second jour, nous avons rejoins la route direction Marrakech en passant par le mont du Tichka. La vue y était magnifique.

26 Février 20h00… fin

Cette date annonce la fin de l’aventure.
Arrivées à Marrakech, des hôtels 4 étoiles ainsi que 2 jours de repos nous attendaient.

28 Février – 3 mars : Retour

C’est le retour en France par la côte Espagnole.
Tout au long de notre trajet, nous avons été en contact avec la population locale, nous n’avons pu que constater la pauvreté qui régnait dans les villages reculés ainsi que dans le désert.

Nous avons essayé de donner un peu de joie à tous ces enfants grâce à la distribution de 6kg de bonbons que nous avions apportés, ainsi que de petites peluches qu’Emmaüs nous avait gentiment données en plus des 50 kg de fournitures scolaires.
Cette expérience restera à tout jamais gravée dans nos mémoires. On ne pourra jamais oublier ces moments passés dans le désert et sur la route et cela grâce à vous.


Merci à Mercure, Studio K, Thallium, la plate-forme du bâtiment, le garage Doyer, Garchette, Alliance Arthrogrypose, auto-école Central, Digital PC, Arcofer, la mairie de Troyes, le garage Clément, le garage Inghem auto, sans oublier Emmaüs.

Marion
gazette n°4 de 2011

Mercredi : Comment pédaler avec les mains…

Étant atteinte d’arthrogrypose principalement au niveau des genoux (flexion limitée) et du dos (scoliose bloquée par une tige), ce n’est pas si facile pour moi de faire du sport ! Pourtant, il faut bien « se bouger » un peu et c’est même d’autant plus important de faire des activités sportives quand on a une arthrogrypose ; histoire de mobiliser ses muscles et articulations.
Le problème, c’est que la plupart des sports nécessitent des articulations bien mobiles et souples. J’ai quand même réussi à pratiquer certains sports comme la natation (avec une endurance limitée). J’ai eu également la chance de faire de l’équitation, mais mon manque de souplesse me bloquait en partie et m’a valu quelques belles chutes et j’ai dû arrêter il y a quelques années…

Cependant, j’ai toujours regardé les cyclistes avec envie : pour moi, le vélo allie bien plaisir sportif et liberté de mouvements permettant de découvrir de nombreux coins sympathiques. Quand j’étais (plus) jeune, j’ai pu pédaler avec un tricycle dont le pédalier avait une faible amplitude. Bien que moins performant que les vélos ordinaires, j’en garde un chouette souvenir (et mon seul os cassé !). Mais je me suis vite retrouvée trop grande pour ce tricycle.

Vers 2007, j’ai appris, je ne sais plus comment, l’existence des « handbikes », ces vélos de type tricycle s’actionnant avec les mains. Le cycliste est confortablement assis (ou mi-couché) les jambes tendues et posées sur des repose-pieds et, cette fois, ce sont les mains et les bras qui travaillent ! On ne pédale pas, on « médale » ! Et les deux bras en même temps, car les bras travaillent mieux en synchronisation contrairement aux jambes.

Je me suis donc renseignée sur ces vélos et j’ai pu louer un vélo pour trois semaines pendant l’été. J’ai donc testé l’engin via des balades avec ma famille le long de l’Escaut (sur des anciens chemins de halage reconvertis en piste cyclables). Je me suis vite rendue compte que c’est un bon appareil de musculation pour les biceps, surtout sur les côtes (j’y fais parfois du trois km/h !) et les faux plats. Par contre, en pente, je trace et dépasse facilement les « bêtes » vélos !

Après cette expérience, je n’ai pas voulu en rester là et j’ai souhaité acquérir un handbike. Mais ça ne se trouve pas chez le marchand de vélos du coin, ces machines ! Et surtout, ce n’est pas gratuit ! Un modèle neuf coûte plus de 3000 euros ! Mais la chance fut avec moi, car je suis assez rapidement tombée sur une petite annonce d’un handbike à vendre en seconde main, la belle aubaine ! Le vendeur m’a proposé d’emprunter ce vélo deux semaines avant de me décider. Les quelques balades que j’ai faites ce temps-là m’ont convaincue et je suis donc devenue la nouvelle propriétaire de ce handbike (après une petite réduction négociée  :-).

Depuis lors, je parcours les pistes cyclables de la région de Tournai (chez mes parents), de Bruxelles (lors des journées sans voitures) ou de la mer du Nord (là, c’est sûr que c’est plat !) avec ce drôle de vélo. Il a même voyagé en France (chez ma sœur Ségolène) et aux Pays-Bas (alors que j’étais invitée par mon frère dans un village vacances).

Ce sport me permet de faire une activité sportive que j’apprécie et que je peux partager avec des gens dits valides. De plus, il m’apporte un regard nouveau par rapport à mon handicap. Non seulement je suis capable de faire du vélo comme les autres (même si ce n’est pas aussi polyvalent et tout-terrain qu’un vélo classique) , mais les gens me regardent autrement, avec intérêt. J’ai souvent entendu des gens ou des enfants lancer à mon passage des phrases du genre : « trop bien ce vélo ! », « Maman, t’as vu ce vélo ? Je veux le même… ». C’est rare que les gens nous envient, ça fait du bien parfois !

Voilà un peu l’histoire de ma découverte du handbike. Pour l’instant, je fais moins de balades, vu le temps d’hiver, mais je m’y remettrai au printemps, et probablement avec une assistance électrique ! En effet, je souhaite plus de puissance et d’endurance pour les côtes et les longues balades. J’étudie donc la possibilité d’adapter une assistance électrique qui me soutiendra pour les passages difficiles. Je vous en dirai des nouvelles !

Madeleine
gazette n° 5 de 2012

Jeudi : Peindre avec la bouche “comme tout le monde”

Pour ceux qui ne me connaissent pas, je me déplace en fauteuil roulant électrique adapté sur mesure (ce qui est très difficile à obtenir de nos jours…). J’ai une arthrogrypose sévère qui handicape mes 4 membres. Je suis mariée depuis 2007 avec Ludovic et nous avons une adorable petite fille Élora de bientôt 3 ans, mon petit soleil !

Depuis l’âge de 9 ans, je fais partie de cette grande famille d’artistes internationaux qu’est l’association des Artistes Peignant de la Bouche et du Pied. Nous utilisons notre bouche ou/et notre pied, du fait du handicap, pour réaliser nos œuvres.
Pour ma part, mon handicap étant de naissance, je me suis instinctivement servie de ma bouche pour palier à l’immobilité de mes bras et mains. J’ai pris les crayons dans la bouche et j’ai dessiné, écrit, comme tous ceux de mon âge. Grâce à mes parents qui m’ont toujours poussée dans ce sens, qui m’ont toujours considérée comme les autres, comme mon frère et ma soeur, et aussi grâce à mon père qui était le meilleur papa bricoleur qui existe, j’ai eu une scolarité normale. A l’école, je faisais comme les autres et au même rythme ; seulement je tenais mes crayons dans la bouche. Je suis ainsi passée du gribouillage, au bonhomme têtard et des dessins enfantins, aux premières lettres de l’alphabet….

J’ai eu la chance de suivre un cursus scolaire ordinaire, j’écrivais avec la bouche ni plus ni moins rapidement, ni plus ni moins bien que les autres.
J’ai eu le goût de la peinture et du dessin très jeune et cet attrait n’a fait que s’accentuer avec les années. Je suis entrée dans un atelier de peinture pour la première fois à l’âge de 7 ans. C’était l’atelier de Mme Folegot, une peintre renommée. Je me suis sentie tellement bien que je suis restée avec elle jusqu’à la fin, jusqu’à mon déménagement, j’avais 33 ans : cours des enfants, puis des adolescents et enfin celui des adultes. Avec elle, j’ai découvert les secrets des couleurs et du dessin, que le plus important était l’observation et la patience. Elle m’a appris à sentir les couleurs et les formes bien plus que les règles académiques. C’est extraordinaire quand, en observant quelque chose, on s’amuse à le décortiquer et à voir toutes les couleurs qui le composent (du blanc, un peu d’ocre, une pointe de bleu…). C’est par la lumière et les contrastes qu’elle procure que quelque chose existe. C’est passionnant d’étudier la forme d’un objet en 3D et de lui redonner cette profondeur juste en traçant des lignes sur une surface plate. C’est assez magique !

J’ai également participé à tous les stages de peinture organisés par Serge Maudet, Président de l’APBP www.APBP.fr qui a illustré le livre réalisé par Alliance Arthrogrypose pour les enfants. Lors de ces stages, je pouvais rencontrer des personnes qui, comme moi, peignaient avec la bouche. On pouvait échanger nos techniques et Serge trouvait et trouve toujours de bonnes astuces pour nous permettre de peindre plus facilement.

Je prends des cours depuis toujours, aujourd’hui c’est mon métier, je suis artiste indépendante. Je participe à un atelier professionnel, 2 jeudis par mois à la galerie Nicole Sibille-Paliard et je prends des cours un jeudi par mois à Grenoble à l’atelier Pigments et Matières d’Albane.

Je touche un peu à tout, j’aime changer et en fait, je crois que j’essaie de me trouver… Je peins beaucoup de portraits en ce moment et plus particulièrement les visages d’enfants des pays lointains. Ils sont beaux et leurs regards parlent pour eux.

Fanny B. fannypeintre.unblog.fr
gazette n° 9 de 2013

Vendredi : Aller plus haut

Au mois de juin, j’ai eu la possibilité, avec Handisport Genève, de m’essayer à l’escalade sur mur. Ça fait plusieurs années que je bave d’envie devant le mur de grimpe de l’hôpital de la Tour, lorsque je vais à mes séances hebdomadaires d’ostéopathie. Mais hélas, ce n’est pas possible d’y accéder. J’ai été déçue mais je me suis fait une raison. Jusqu’à ce que, le mois dernier, en allant chercher un renseignement sur la page internet d’Handisport Genève, je vois une annonce : une journée porte ouverte au mur de grimpe, dans un nouveau complexe qui a ouvert ses portes en avril dernier. Je me renseigne, pour connaître les critères de sélection, savoir s’il y a encore de la place et m’informer sur le lieu géographique.  Super, je suis une des premières inscrites, je peux donc choisir ma tranche horaire. Je regarde l’emplacement de la salle en question et là j’ai une bonne surprise. C’est dans la commune d’à côté, à dix minutes en voiture de chez moi.

Arrive le jour tant attendu : je me présente à la réception du centre. La responsable de SHG (Sport Handicap Genève) et mon instructeur du jour m’accueillent et me présentent dans les grandes lignes cette discipline. On m’apporte le matériel, composé de chaussons d’escalade et d’un baudrier. Alors les chaussons, bien que ça soit ma taille, qu’est-ce que l’on est serré à l’intérieur ! On m’explique que c’est normal et que c’est le but.
 

Le baudrier n’est pas nouveau pour moi, car j’en ai déjà eu un lors de mes compétitions de marche avec ma chienne. En revanche, il y a quand même quelques petites différences avec le matériel de cani cross. On me prépare et là, plus possible de reculer. Je contemple ce mur d’escalade, immense.

Je me sens soudainement toute petite face à cette grande paroi, parcourue par des cales, pour les pieds et les mains. Comme c’était une journée porte ouverte, j’ai utilisé un mur avec une voie déjà toute préparée. Du fait que je ne plie pas correctement les genoux (en plus, avec le semi-confinement, et l’impossibilité de sortir me promener en forêt comme j’en ai l’habitude, j’ai perdu de l’amplitude, et à présent, je n’arrive plus à plier si facilement les jambes à angle droit), ça n’a pas été très aisé de grimper.

Mon instructeur du jour, Adrien, m’a expliqué que le but était d’utiliser la même couleur de cale sur tout le parcours. En raison de l’arthrogrypose, je n’y suis pas arrivée. Car les prises étaient soit trop hautes, soit trop éloignées l’une de l’autre. Alors j’ai improvisé. Idem pour les prises pour les mains. J’avais l’impression de faire un remake de « walk like an Egyptian » dans mes tentatives de grimper. Cela n’a pas été facile, mais qu’est-ce que j’ai adoré. Une heure après, il a fallu redescendre. Et hop, j’expérimente une technique expliquée par Adrien : se laisser descendre en rappel, tout en s’éloignant de la paroi en y donnant des grands coups de pieds. C’est plus facile à maitriser que pour monter. Et plus rapide aussi.

Après l’heure d’essai, la responsable de SHG m’a demandé mon ressenti, si ça me plaisait et si j’étais intéressée par l’intégration dans la section « grimpe ». Oh que oui ! Malgré la difficulté, cette initiation a confirmé que cette discipline était pour moi. Car sans en avoir l’air, elle va me permettre de pouvoir progresser dans plusieurs domaines : gagner en force dans les bras (quand je dois me hisser à la force du poignet), gagner en souplesse dans les jambes et faire travailler la matière grise. Et oui, car il faut bien observer les prises pour trouver le parcours à suivre. Cette section doit être active en 2022. Encore six mois à attendre avant que je ne puisse ajouter cette discipline à mon actif.
 
Je vous laisse avec ce lien vous permettra de vous faire une idée de mon futur terrain de jeu : www.grimper.ch/visite-360

Amitié depuis la Suisse.

Corinne
gazette 24 de 2022

Samedi : Notre aventure pour avoir un enfant…

Pour notre grand bonheur, Élora est née le 13 décembre 2010.

Cette aventure a débuté bien plus tôt, au moins trois ans avant…

En effet, atteinte d’une arthrogrypose sévère, mon mari et moi-même avons préféré prendre nos précautions. Premièrement pour savoir s’il m’était physiquement possible de supporter une grossesse. Deuxièmement pour effectuer des tests génétiques afin de connaître les risques d’hérédité de mon handicap.

Habitant en banlieue parisienne, la logique veut que je m’adresse aux hôpitaux de la Capitale. Ce qui semble un détail va devenir un sacerdoce… Nous voilà partis et embarqués dans une course folle aux renseignements. Personne ne veut me suivre. « Êtes-vous myopathe ? Êtes-vous paralysée ? Êtes-vous…..? Non, alors nous ne sommes pas compétents pour vous suivre… ». Quand enfin un ou deux services acceptent de nous recevoir, il n’y a pas de suivi… Nous sommes ainsi baladés de services en services et même d’hôpital en hôpital. Finalement, c’est le Centre de Référence des Arthrogrypose du CHU de Grenoble qui nous dirigera vers l’hôpital Pitié-Salpêtrière qui prendra en charge notre dossier. Parallèlement, nous continuons à visiter différents services et je subis plusieurs examens dont une IRM et une oxymétrie nocturne. Et le temps passe, passe… En revanche, aucun test génétique soi-disant n’existe et il est impossible de connaître les risques d’hérédité… Une précieuse information qui pourrait influencer notre décision.

A chaque fois les mêmes réponses reviennent et, peu à peu, on sent que le but est de nous décourager par rapport à ce projet. On nous parle de risque héréditaire, de risque vital, de danger mortel, de trachéotomie, etc. On me demande à mi-mots, si on a bien réfléchi à des solutions pour s’occuper de l’enfant après sa naissance,… On me dit que j’ai déjà « beaucoup de problèmes et que ce n’est pas la peine d’en rajouter » (dixit une anesthésiste). Et le pire de tout restera que le Professeur X, de la Pitié-Salpêtrière, nous conseillera de prendre une mère porteuse. Il insistera même lors de nos différents rendez-vous sur ce point. Rappelons que c’est illégal en France ! Je ne suis pas contre, mais ce n’est pas la raison pour laquelle on vient le voir. Et si déjà on commençait par étudier mon cas. Mon mari et moi sommes choqués que la seule solution qu’un obstétricien nous propose soit illégale et très onéreuse pour nous, les patients. Une aberration, quand on y pense..!!! A se demander, si nous n’étions pas un peu comme des cobayes. Il voulait qu’on lui raconte nos tenants et aboutissants.

Cela dure environ 2 ans. Pris dans notre quotidien bien chargé (travail etc.) nous ne pouvons nous y consacrer à 100%. Les examens prennent du temps et il faut souvent attendre 6 mois pour en passer un. Ainsi, le temps passe et nous, nous stagnons… Mon mari commence à douter. Bien sûr que non il n’est pas prêt à risquer la vie de sa femme pour un enfant. Moi, je n’y crois pas. Je ne me reconnais pas dans le portrait que ces médecins font de moi. Je veux continuer, je veux d’autres avis… Mon mari est partant.

Ayant eu connaissance de la possibilité de tests génétiques au Centre de Référence Des Arthrogryposes au CHU de Grenoble et ayant rencontré l’équipe quelques années auparavant pour un simple diagnostic, nous n’hésitons pas. Nous fixons un rendez-vous avec ce service.

Et là… Quel accueil !!! Quelle chaleur !!! Comme on est bien reçu. On s’intéresse à nous, à notre espoir. En une semaine, les tests nécessaires sont passés. J’ai réussit à rencontrer toute l’équipe ainsi que l’anesthésiste. C’était surtout ce point qui posait problème. Mes veines, comme la plupart des personnes atteintes d’arthrogrypose, sont quasi invisibles. Toutefois, en fin de semaine, la conclusion nous est donnée. Je garde la tête froide. Je sais qu’on peut nous apporter une réponse négative, mais je me fierai à leur jugement. J’ai confiance et si l’équipe pense que cela est trop risqué, nous opterons pour d’autres solutions comme l’adoption. Nous y avons déjà réfléchi.

L’attente est très courte. Nous sommes appelés dans la salle de réunion. Toute l’équipe est là… On nous sourit et avec quelques réserves, on nous explique la situation. J’ai du mal à tout suivre, l’émotion… Mais oui, c’est bien ça. Quelle surprise !!! C’est oui ! L’équipe nous donne son feu vert et nous fait comprendre qu’ils sont étonnés par les bilans très pessimistes des hôpitaux parisiens… Selon eux, il n’y a pas de risques majeurs pour ma santé. Leur seule condition (et on la comprend) est que nous venions le temps de la grossesse vivre près du CHU. Les tests génétiques ne révèlent aucun risque particulier d’hérédité. Donc tout va bien !

En quelques mois, nous quittons tout, trouvons une maison adaptée (une chance !) près de Grenoble. On emménage en septembre 2009 et le 1er avril (et ce n’est pas un poisson), je suis enceinte. Depuis notre arrivée, je suis suivie par la gynécologue obstétricienne de la maternité de l’hôpital Mme Equy. Encore une chance ! Pétillante, humaine, rassurante et même comique, elle dédramatise tellement la situation que je finis par être complètement sereine. Il faut dire qu’en février j’ai subi un curetage (petite intervention) pour une fausse couche. Ce malheureux incident aura eu l’avantage de me réconforter par rapport à la possibilité d’être anesthésiée (en cas d’hémorragie durant la grossesse, pour la césarienne, etc..). Mes veines étant invisibles, on ne peut me piquer que dans le cou (carotides). De plus, je garde en mémoire les commentaires angoissants des anesthésistes parisiens…

Depuis bien longtemps, je sais que j’accoucherai par césarienne et sous anesthésie générale. Autant pour d’autres femmes cela peut être dur à digérer, autant pour moi c’est comme une évidence. J’ai déjà une chance inouïe de pouvoir avoir un enfant. Le reste m’est égal. La médecine a fait des progrès, j’en profite. C’est vrai, je ne le ou la verrai pas naître. Mais je ne veux prendre aucun risque. On n’a pas le droit. On met toutes les chances de notre côté. Ayant une arthrodèse au niveau de la colonne vertébrale, une péridurale est impossible et là-dessus le Docteur, Mme Chirossel, mon anesthésiste est déçue (pour nous), mais formelle.

Ainsi, les 3 premiers mois passent et mon ventre s’arrondit. J’ai tous les maux qui accompagnent les grossesses en général, mais ils n’ont rien à voir avec mon handicap. Je suis nauséeuse du matin au soir, je ne peux rien avaler… Le 2ème trimestre, je nage dans le bonheur. Les nausées se calment un peu. Et surtout, je sens bébé bouger. Notre petite fille pousse et mon ventre s’arrondit. Je suis fière de le montrer, c’est vrai. Être enceinte et handicapée vous imaginez à quel point j’étais prioritaire aux caisses réservées des supermarchés ?! C’est l’été et nous avons plein de visites de famille et amis. Ce seront les moments rêvés de ma grossesse.

A 7 mois ½, je suis prise de violentes douleurs dans tout le bassin… je ne peux plus bouger un orteil. Ce sont, en fait, des douleurs ligamentaires qui me clouent au lit. Ces douleurs sont, heureusement, anodines pour la santé du bébé et de la maman. Mon mari est au petit soin. Depuis le début entre les nausées et le reste, il est d’un grand soutien. Mes parents aussi sont très présents. Habitants la Région Parisienne, ils sont venus vivre, sans hésiter, en Isère aussi pour être à nos côtés. On ne saura jamais si ces douleurs ont été accentuées par ma position semi debout, à cheval sur mon assise ou bien si le résultat aurait été le même sans handicap. Je resterai presque un mois et demi alitée. Il faut tout bien organiser. Ne pouvant m’asseoir, chaque trajet pour la maternité s’effectue en ambulance.

Peu à peu les douleurs s’estompent et au cours du 8ème mois, je peux rester presque 3h par jour dans mon fauteuil. Prendre mes 2 repas debout est un vrai bonheur. Déjà que je digère très mal, alors manger couchée était encore pire. De plus, avec mon ventre devenu très encombrant, pour m’aider à bien me ventiler et ne surtout pas manquer d’oxygène, je porte un masque toutes les nuits (une VNI) qui impulse l’air ambiant afin d’aider mon diaphragme à faire son travail. Au début, j’ai un peu de mal à m’y faire, mais ensuite, j’ai du mal à m’en passer… Je sens bébé bouger et je sais que, bientôt, je découvrirai sa frimousse. On est impatient : moi, plus excitée que stressée, lui, très angoissé. Comment oublier tout ce que les premiers médecins nous ont dit…? Il ne peut s’empêcher d’y penser.

A 5 semaines de la date présumée de la césarienne, j’ai un rendez-vous par semaine avec la gynécologue. A chaque fois, la grande question est : faut-il programmer la césarienne dans les jours qui viennent ou bien peut-on encore retarder l’échéance ? Évidemment le mieux étant d’attendre un maximum. On avait fixé une date assez aléatoire quelques semaines avant le terme : le 13 décembre. Et j’attendrai cette date pour accoucher. Je me rends compte que tout le personnel est agréablement surpris et rassuré. Rien ne laissait pourtant paraître leur inquiétude sur ce point. Non, notre enfant ne naîtra pas prématurément, seulement 3 semaines avant terme, comme prévu.

Le 12 décembre, l’ambulance nous dépose à la maternité. Mon mari peut rester avec moi toute la semaine jour et nuit. Tout est prévu depuis longtemps. Je dois subir une prise de sang obligatoire pour l’intervention du lendemain. Mais là, impossible. L’infirmière ne trouve aucune veine dans ma jambe. Une anesthésiste passera dans la soirée, mais elle me piquera pour rien. Mes jambes font un peu d’œdème (une chance quelque part, car ce sera la seule fois). Il faudra donc attendre le lendemain matin pour faire cet examen. La nuit semble longue et interminable. Tout se bouscule dans nos têtes. Demain à la même heure on aura notre bébé avec nous. C’est incroyable et inimaginable…

Lundi 13, la césarienne se passe bien. L’anesthésiste doit s’y prendre à plusieurs reprises pour trouver un endroit valable dans mes carotides, mais avec douceur et persévérance, elle y parvient. Les résultats de l’examen sanguin (normalement fait la veille) sont longs, très longs à arriver… Et à l’heure où tout aurait dû être finit, je rentre enfin au bloc opératoire. On me dit de compter 1, 2, 3,…. Plus rien… Je dors.

Tout à coup, j’émerge de « je-ne-sais-où », j’entends au loin la voix du Docteur Chirossel (anesthésiste) qui me dit « respirer Fanny, allez, respirer ! », mais non, je n’y arrive pas, je panique, la cage thoracique ne bouge pas, elle est si lourde. Je dois lui dire, j’essaie, elle ne m’entend pas, j’ai peur. Suis-je morte…? Mon bébé, je ne l’ai même pas encore vu.. De nouveau, plus rien… Et puis, un cri au loin, de plus en plus fort, une peau douce, si douce… J’ouvre les yeux. Elle est là. Ma chérie est contre ma joue.

Elle m’a réveillé. Je ne comprends rien, mais j’ai des larmes de joie. Ils sont là, mon homme et mon bébé. Je suis toujours au bloc. Je me rendors… encore… En tout, j’aurai été endormie plus de trois heures. En fait, comme on me l’expliquera plus tard, j’ai fait une réaction à l’un des produits anesthésiant : le curare. Alors, après un réveil raté, ils ont dû me maintenir endormie jusqu’à son évacuation totale. Le curare est ce qui paralyse le corps, il agit sur les muscles etc. Est-ce que cette réaction est due à l’arthrogrypose ? C’est une question que l’anesthésiste s’est posée. En tous cas, même si j’ai eu une belle frayeur, jamais ma vie n’a été en danger. Tout était sous contrôle.

A la maternité, nous avons une chambre entièrement adaptée spacieuse avec douche au sol et une table à langer-baignoire réglable en hauteur électriquement (dont je n’aurai pas l’usage car je resterai alitée). Tout le personnel est extrêmement gentil, à mon écoute et cherche toutes les solutions possibles pour l’allaitement. Ce sera encore une épreuve. Une bataille qu’Élora, le papa et moi-même gagnerons ensemble, grâce à des sages-femmes et des auxiliaires puéricultrices patientes, encourageantes et persévérantes. Merci à « eux » (oui « eux » car nous avons eu un homme « sage-femme »)

A partir de ce moment là, ma vie a changé…! Élora est née et une nouvelle aventure a commencé….

Je ne pourrai jamais assez remercier le Professeur Jouk, Généticien et à la tête du Centre de Référence des Arthrogrypose, pour son humanisme et sa grande délicatesse, le Docteur Gipsy Lopez, Conseillère en Génétique qui est toujours à l’écoute même quand on appelle plusieurs fois pour connaître des résultats, le Docteur Véronique Equy, Gynécologue Obstétricienne pour son optimisme, son humour et sa vitalité et le Docteur Chirossel, Anesthésiste sans qui tout cela n’aurait pu être possible. Je leur dois, nous leur devons le plus grand bonheur de notre vie : Élora !

Fanny et Ludovic
gazette 6 de 2012

Dimanche : Repousser les limites

Comment me présenter et que dire ? Je suppose que si j’écris ici, c’est que je dois partager, avec un certain nombre d’entre vous, une caractéristique physique… A vrai dire, je pense que nous partageons tous ces mêmes caractéristiques… mais modifiées.

Cela fait 33 ans que je suis étiqueté « atteint d’arthrogrypose ». En cela, nous ne sommes que peu à partager ce label. Grand bien nous en fasse. Si nous avions eu le besoin de nous sentir différents, cela nous a permis d’y être automatiquement, sans en avoir eu le choix ni même l’envie.

J’ai la « chance » (En est-ce vraiment ?) de n’être « atteint » d’arthrogrypose qu’aux bras : épaules, coudes, poignets. Il m’a toujours fallu surmonter des obstacles, les contourner, voire me moquer d’eux : pour se laver les cheveux, faire une touche au football, se faire une queue de cheval (car j’ai eu les cheveux longs), taper un texte à l’ordinateur, etc. Je me suis même surpris à me diriger vers la difficulté, encore pour me moquer d’elle : je joue de la guitare, j’ai pratiqué le Kendo (escrime japonais), le tennis de table et je joue aujourd’hui au baseball. Ou l’art d’utiliser un membre défaillant !

Depuis mon plus jeune âge et jusqu’à 19 ans, j’ai suivi des séances de kiné, à raison de deux fois trente minutes par semaine. Pas de problème jusqu’à l’adolescence. Dès lors et jusqu’à la fin, ces séances représentaient un empêchement de faire autre chose de plus « fun » avec les copains. Ironie du sort, c’est pendant ces séances qu’est né un intérêt particulier : celui d’aider les autres, notamment les personnes en situation de handicap (donc potentiellement moi-même), camarades de torture hebdomadaire. Avec le temps, cet intérêt s’est transformé en passion puis en profession. Et donc, en 2012, après des années de bénévolat dans le domaine social, j’ai décroché mon Bachelor en Éducation Sociale.

Bienne en Suisse

Aujourd’hui, je suis un homme marié et globalement heureux. Je le serai davantage en partageant, échangeant avec les personnes qui ont la même étiquette que moi, et avec les autres aussi…

Médéric
gazette 15 de 2016